Le 6 novembre 2014, Amazon prenait de court le monde de la Tech en dévoilant, à la surprise générale, la première génération de son enceinte connectée Amazon Echo et son assistante vocale Alexa. Alors que Siri, qui soufflait sa troisième bougie quelques mois plus tôt, se limitait encore à la commande vocale des iPhone, la firme de Seattle nous faisait la promesse d’une intelligence artificielle capable de simplifier nos vies en pilotant nos maisons connectées. Une révolution semblant tout droit sortie d’un livre de science-fiction qui n’a pas manqué de passionner de nombreux fans de technologie, en particulier de domotique, puis de toucher un public bien plus large dont l’intérêt serait cependant peu à peu en train de s’estomper…
Selon Bloomberg Businessweek, Amazon aurait en effet bien du mal à retenir l’attention des utilisateurs d’Alexa. Pire encore, le magazine financier dit avoir consulté des documents internes relevant que 15 à 25 % des nouveaux utilisateurs ne se servaient plus de leur enceinte connectée après seulement une semaine. Des informations qu’Amazon conteste pour partie, affirmant qu’elles sont soit obsolètes, soit inexactes. Alors, info ou intox?
Amazon Alexa en perte de vitesse?
Quelques jours après que le géant du e-commerce a déclaré avoir enregistré un recul de 1.2% des ventes de ses appareils Amazon Echo en 2021, le magazine Bloomberg Businessweek a profité de l’occasion pour jeter un pavé dans la marre en affirmant qu’Alexa aurait en réalité bien du mal à susciter l’intérêt des utilisateurs après quelques semaines d’utilisation.
Selon un graphique issu de documents internes de l’entreprise, Alexa ne serait en réalité utilisée chaque semaine que par seulement 74% des utilisateurs de smart displays Echo Show, ce pourcentage s’effondrant à 66% pour ceux disposant d’une simple enceinte Amazon Echo et 56% pour les propriétaires d’un Echo Dot. Des chiffres à prendre avec des pincettes, d’autant qu’ils nous sont présentés sans informations complémentaires.
Des informations d’ailleurs aussi vite démenties par Kinley Pearsall, directrice des relations presse d’Amazon, qui déclare dans un e-mail que son entreprise n’a au contraire jamais été aussi optimiste à son sujet. « L’affirmation selon laquelle la croissance d’Alexa ralentit n’est pas exacte. » explique-t-elle. « Le fait est qu’Alexa continue de croître – nous constatons une augmentation de l’utilisation des clients et Alexa est utilisée dans plus de foyers dans le monde que jamais auparavant ».
« L’affirmation selon laquelle la croissance d’Alexa ralentit n’est pas exacte. »
Un engouement que relevait justement Gianmaria Visconti, Amazon Alexa Country Manager, qui nous expliquait à l’occasion des 3 ans de la version francophone que « durant les trois premières années depuis l’arrivée en France, le nombre de clients utilisant activement Alexa a connu une croissance considérable, 50 % par an, et, rien qu’en 2021, 2,4 milliards d’interactions ont été réalisées entre les utilisateurs français et Alexa. » Un constat que nous ne saurions que corroborer en tant qu’observateurs attentifs d’Alexa depuis ses débuts.
Néanmoins, il convient de ne pas nier les limites actuelles des assistants vocaux, tout comme il est de bon ton d’admettre qu’elles ne sont pas non plus le seul fait d’Alexa…
Un problème systémique?
Bien que l’article de Bloomberg ne vise qu’Amazon, le problème semble en réalité systémique. En effet, tous ceux qui en utilisent quotidiennement vous le diront, les assistants vocaux sont encore extrêmement limités. Aucun n’échappe à la règle. Qu’il s’agisse d’Alexa, Google Assistant, Siri, Bixby ou encore XiaoAI, tous ont d’énormes progrès à faire. En cause, la jeunesse de leurs technologies d’une part, le nécessaire apprentissage de leurs intelligences artificielles d’autre part, mais également des attentes parfois trop importantes de leurs utilisateurs.
Encore jeunes, les assistants manquent d’une maturité certaine et peuvent s’avérer frustrants pour certains utilisateurs dont les attentes sont probablement trop grandes, et pas forcément toujours en adéquation avec les capacités actuelles de ces machines.
Comme l’explique à Bloomberg Greg Gottesman, directeur général et co-fondateur de Pioneer Square Labs, « nous sommes encore en avance. Dans cinq ans, dans dix ans, les gens utiliseront Alexa pour bien plus que ces trois choses ». En effet, si l’on met de côté les usages Smart Home, on peut considérer qu’un assistant vocal ne va servir qu’au streaming audio ou vidéo, à mieux gérer son temps avec de petites applications, et à communiquer avec ses proches.
« Amazon a enregistré en France plus de 490 millions d’interactions entre des appareils connectés et Alexa […] »
C’est d’autant plus vrai que, bien que des applications existent depuis les années 1980, la domotique est encore loin d’être le quotidien de tous. Or, à ce jour, le principal usage d’un assistant vocal demeure la maison connectée. Si vous n’avez pas d’objets connectés à piloter, l’expérience est forcément bien plus limitée, les usages se résumant dès lors à la musique, la radio, et quelques fonctionnalités pratiques telles que les minuteurs, calendriers, rappels et autres pense-bêtes.
Au contraire, pour ceux désireux de bénéficier du confort d’une Smart Home, les possibilités vont déjà bien au-delà, comme nous l’évoquions justement la semaine dernière dans notre guide Alexa à destination des nouveaux utilisateurs.
Alexa au cœur de nos maisons connectées
A l’occasion de son septième anniversaire, Amazon nous communiquait quelques chiffres relatifs à l’utilisation d’Alexa dans le cadre de la maison connectée. Il faut dire qu’avec plus de 140 000 appareils compatibles, il s’agit de l’assistante la plus performante dans ce domaine.
Ampoules et prises connectées, sonnettes vidéos et caméras de vidéosurveillance, téléviseurs intelligents, robots aspirateurs ou encore routeurs Wi-Fi sont désormais pilotables à la voix grâce à Alexa qui propose plus de 600 skills liées à la maison connectée. L’année passée, Amazon a enregistré en France plus de 490 millions d’interactions entre des appareils connectés et Alexa, les utilisateurs français ayant programmé plus de 250 millions de routines afin d’automatiser et simplifier leurs journées.
Bref, vous l’aurez compris, si Amazon emploie plus de 10 000 personnes pour Alexa, Bloomberg évoquant des coûts fixes de 4,2 milliards de dollars en 2021, ce n’est évidemment pas sans raison. Étant donné le taux d’équipement encore très faible de la population, le marché de la Smart Home est en effet appelé à devenir colossal. Le n°1 mondial du e-commerce l’a bien compris et s’attèle, en bon commerçant, à rendre incontournable son assistant vocal dans le domaine et à en faire le centre névralgique de nos maisons connectées.
Son dernier opus, Echo Show 15, en est d’ailleurs une parfaite illustration, Amazon répondant avec ce produit à une demande pressante de la part des utilisateurs d’Alexa de pouvoir contrôler leurs systèmes depuis un écran tactile placé sur un mur. Et l’entreprise créée par Jeff Bezos ne compte pas s’arrêter en si bon chemin, travaillant déjà sur ses évolutions futures, notamment le robot domestique Amazon Astro présenté en septembre dernier.
Bref, enterrer Alexa et consorts serait une belle bêtise et nul doute qu’à l’instar d’Internet et des smartphones, qui ont tous deux mis plus de 10 ans à s’imposer, les assistants vocaux seront également un jour le quotidien de tous. Gageons que, dès lors, nous aurons droit aux mêmes simagrées concernant Astro et la robotique domestique…