Autrefois pionnière, l’IA d’Alexa paraît aujourd’hui un peu désuète et peine à rattraper ses nouveaux concurrents. Malgré des promesses d’améliorations l’an dernier, Remarkable Alexa n’est toujours pas disponible et, pour la première année depuis son lancement, Amazon n’a présenté aucune nouveauté concernant son assistante vocale en septembre dernier. Jeudi dernier, à l’occasion de la présentation des résultats d’Amazon, Andy Jassy s’est toutefois dit confiant en son avenir et a brièvement évoqué ses prochaines évolutions.
Remarkable Alexa : un projet qui traîne en longueur
Présentée pour la première fois par Jeff Bezos en 2014, Alexa fut le premier assistant vocal intégré à une enceinte connectée, révolutionnant la façon dont nous interagissons avec nos appareils et nos maisons connectées. Mais, près de dix ans après son introduction, Alexa se trouve actuellement dans une situation délicate. Entre intensification de la concurrence et défis techniques, Amazon semble bien en peine de la faire évoluer et de rattraper ses nouveaux concurrents, les fameuses IA génératives qui font les choux gras de la presse depuis 2 ans.
En avril 2023, Andy Jassy, l’actuel PDG d’Amazon, nous avait pourtant promis une évolution majeure avec le développement d’un nouveau grand modèle de langage (LLM) capable de faire d’Alexa « le meilleur assistant personnel au monde », mais force est de constater que, un an après sa présentation pourtant convaincante, les choses n’ont pas bougé d’un iota pour les utilisateurs et Remarkable Alexa reste une promesse encore non tenue.
Pour rappel, Remarkable Alexa désigne la future IA qui devrait rendre l’assistante vocale plus conversationnelle et contextuelle, permettant des dialogues prolongés, des actions simultanées, et des automatisations intelligentes adaptées aux habitudes des utilisateurs. Amazon prévoit de la proposer via un abonnement de 5 à 10 dollars par mois qui offrira des fonctionnalités avancées. Cette mise à jour vise à concurrencer les autres assistants vocaux comme Siri qui intègrera prochainement ChatGPT et Google Assistant qui devrait logiquement se rapprocher de Gemini à terme. Mais chez la concurrence aussi, nous n’en sommes toujours qu’au stade des promesses.
Une tentative d’amélioration avortée
L’été dernier, Andy Jassy, l’actuel PDG d’Amazon, a entrepris de tester un prototype amélioré d’Alexa avec une IA générative rivalisant avec ChatGPT. Fan des New York Giants et investisseur dans l’équipe de hockey des Seattle Kraken, Jassy a poussé l’assistant dans ses retranchements en lui posant des questions pointues sur ses sports préférés, allant jusqu’à lui demander des statistiques de performance des joueurs et des résultats de match. Les réponses furent apparemment plutôt convaincantes, laissant entrevoir un certain potentiel, mais elles étaient souvent trop longues et parfois un peu hors sujet. Plus problématique encore, la nouvelle IA d’Alexa aurait rencontré plus de mal à exécuter des commandes basiques, mettant parfois plusieurs secondes pour activer un objet connecté. Autrement dit, l’IA aurait progressé d’un côté, mais régressé de l’autre, or il ne faut pas oublier que les utilisateurs se servent principalement de leur assistant vocal pour contrôler des appareils dans leur maison connectée et que la domotique a toujours été un point fort d’Alexa face à ses concurrents. Pas question de régresser sur ce point donc.
En définitive, alors que Remarkable Alexa devait être présentée le 17 octobre dernier, le calendrier du projet s’est considérablement allongé à en croire Bloomberg qui révélait mercredi qu’Andy Jassy aurait finalement donné plus de temps à ses équipes pour peaufiner l’IA générative d’Alexa, repoussant la date limite du projet à 2025. En effet, comme nous l’évoquions début septembre, alors même que les équipes d’Alexa AI travaillaient depuis des mois sur un nouveau LLM, les grands chefs du projet auraient changé de stratégie en cours de route et décidé d’intégrer Claude AI, une IA générative conçue par Anthropic, société dans laquelle Amazon a investi 4 milliards de dollars.
L’avenir d’Alexa : un projet d’IA à la dérive ou un futur leader ?
Certains employés d’Amazon pointent du doigt la bureaucratie et le poids des couches de management comme frein au progrès d’Alexa. Jassy lui-même, dans un mémo du 16 septembre dernier, a critiqué les « réunions préliminaires aux réunions de décision » qui ralentissent le processus décisionnel. Mais le problème semble aller plus loin. Alors que l’entreprise s’est historiquement imposée comme pionnière dans des secteurs comme le streaming vidéo ou les ventes en ligne, le retard d’Alexa face à la concurrence actuelle en IA semble symptomatique d’un manque de vision claire. Autrefois en avance sur ses concurrents, Amazon se retrouve désormais en situation de rattrapage, ce qui ne semble pas pour autant inquiéter son PDG qui s’est montré confiant jeudi dernier lors de la traditionnelle conférence téléphonique sur les résultats du troisième trimestre 2024.
« Je pense que la prochaine génération de ces assistants et applications d’IA générative sera plus efficace non seulement pour répondre aux questions et résumer, indexer et agréger les données, mais aussi pour prendre des décisions », a ainsi déclaré Andy Jassy, « et vous pouvez imaginer que nous sommes plutôt bons dans ce domaine avec Alexa. » Plutôt rassurant, le dirigeant a expliqué que ses équipes continuent de « réorganiser le cerveau » de l’assistante vocale avec « un nouvel ensemble de modèles de base » et que ces nouveautés seront révélées « dans un avenir proche ». Pour ceux qui, comme nous, espéraient les découvrir à l’occasion du dixième anniversaire d’Alexa, c’est donc raté, il faudra encore attendre une année.
Quoi qu’il en soit, Amazon fait aujourd’hui face à un défi de taille. Dans un contexte de concurrence féroce en matière d’IA, Alexa est indéniablement en déclin et ses perspectives d’avenir demeurent encore incertaines. Fort heureusement, les équipes d’Amazon semblent avoir pris le sujet en main et, si elles parviennent à proposer rapidement un assistant vocal avec une IA puissante et intuitive, Alexa pourrait redevenir le leader du marché. À défaut, elle risque d’être reléguée au rang des échecs technologiques de grande envergure.